Chirurgie
III - Manipulation du cerveau
partie 2 :
Quand les hommes chatouillent leurs neurones
Les opérations chirurgicales visant à opérer des tumeurs, ou réduire la tension intracrânienne ne sont pas les seules manipulations de cerveau réalisées, ni les seules envisagées par la
science-fiction.
Les auteurs de science-fiction imaginent, comme nous l’avons déjà vu, de nombreux implants électroniques parfois même très sophistiqués comme dans la nouvelle Axiomatique de Greg
Egan : « On mettait l’objet dans le programmateur, on le « réveillait » et on lui disait combien de temps on voulait qu’il demeure actif […]. Les connaisseurs blasés
posaient l’implant en équilibre sur leur petit doigt et se l’enfonçaient dans la narine de leur choix. Il se frayait un chemin jusqu’au cerveau et envoyait un essaim de nanomachines pour explorer
les systèmes neuronaux appropriés avec lesquels ils créaient des liens avant de passer en mode actif pour un temps déterminé […] et faire ce pour quoi il avait été fabriqué. »
La science fiction imagine aussi l’inverse, l’implant de neurones. Dans « Le point de vue du plafond » (recueil « Axiomatique »), Greg Egan fait intervenir de
la chirurgie robotisée : « Un petit nombre de mes neurones […] subissent donc une régression génétique à un état fœtal, sont stimulés pour se multiplier in vivo et sont réinjectés
dans la lésion. Sous anesthésie locale. » Mais ceci n’est pas que de la fiction. L’une des voies de traitement d’affections neurodégénératives, telles que la maladie d’Alzheimer, de
Parkinson ou la chorée de Huntington [1] passe par greffe de neurones. Plusieurs pistes sont envisagées : les greffes de neurones embryonnaires (utilisation de neurones d'embryons humains
provenant d'IVG) sont employées depuis une dizaine d’années en complément d’apport de dopamine, les greffes de cellules prélevées au niveau du cortex du patient mais cette technique n’est pas
encore aboutie, la greffe de cellules souches (non différenciées) après les avoir cultivé in vitro pour les transformer en cellules cérébrales. Une autre étude [2] explore la greffe de cellules
nerveuses non différenciées prélevées sur le cerveau d'une personne décédée. Pour l’instant, ils ne sont pas arrivés au stade de la greffe, mais ont réussi à maintenir en vie ces cellules. Elles
ont également proliféré avant de se différencier.
Certains chercheurs se penchent aussi sur le transfert de cellules cérébrales entre espèces. Ainsi, Evan Balaban, à l'université Mc Gill de Montréal signale qu’ « On peut obtenir un
poulet qui a le cri de la caille, parfois même plus qu'une caille normale »
La suite de ces expérimentations mène tout droit vers la greffe de cerveaux. En 2001 [3], le professeur Robert White [4], de l’Université Case Western de Cleveland, dans l'Ohio, a transféré le
cerveau entier d'un singe dans le corps d'un autre singe. Cela a enclenché une controverse importante dans la communauté scientifique, étant donné qu’il semble impossible de rétablir les
connexions nerveuses lors de la transplantation.
Ces transplantations soulèvent également des questions éthiques, car il n’y a pas là de but thérapeutique, contrairement à ce qu’imagine Greg Egan dans sa nouvelle « Un amour
approprié ». Suite à un grave accident de train, Chris est grièvement blessé. Trop d’organes sont atteints, il peut donc survivre à condition d’avoir un nouveau corps. Mais le
cerveau, lui, fonctionne et peut être implanté dans un clone né d’une mère porteuse.
L’implantation de neurones ne transfère pas les connaissances ni la personnalité. Ce sont les connexions complexes existant entre les neurones qui définissent ces aspects. Mais la science-fiction
est friande des situations où les souvenirs subissent eux aussi des manipulations.